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Théâtre... libertés et exil dans la nouvelle Algérie !

La perspective d’un art, dans un pays fermant l’horizon aux expressions.

lundi 1er janvier 2024, par Nacer Djabi, populiscoop

J’ai passé la dernière semaine de cette année au Théâtre National, à l’occasion de l’organisation du Festival National du Théâtre Professionnel, tenu périodiquement par l’Algérie, comme chaque année. Chaque soir, en allant voir l’une des pièces programmées, je riais de moi-même, me disant que toutes nos affaires semblaient être en déclin dans le pays, y compris le théâtre que nous fréquentons de cette étrange manière.

Par Nacer Djabi.

Source, Al-Quds. Traduit par Populi-Scoop.

Nous assistons à dix pièces de théâtre en une semaine, puis tout se termine, laissant le vide pour le reste de l’année, bien que le temps soit agréable et chaud ces jours-ci à Alger, avec une sécurité disponible dans la capitale, même si les transports en commun s’arrêtent partiellement le soir, même si le métro d’Alger cesse ses activités à 21 heures ! Dans cette belle ville méditerranéenne, qui ferme ses portes au coucher du soleil, en tant que règle générale.

Une conférence du sociologue Nacer Djabi, censurée à Batna, lors de la fête de Yenayer.

Les pièces attirent les familles pour en profiter avec une présence raisonnable - la présence féminine est encore faible, surtout dans une ville aussi grande que la capitale. Bien que l’activité théâtrale en Algérie n’ait pas réussi à créer un public propre, en raison de cette interruption dont j’ai parlé. La gestion bureaucratique qui est toujours présente dans les affaires culturelles du pays, transformant les théâtres régionaux en des domaines d’emploi bureaucratique, environ 18 selon les informations obtenues d’un homme de théâtre bien connu. Les budgets de consommation sont généralement faibles, ne suffisant que pour produire une pièce de théâtre par an dans le meilleur des cas, laissant le vide pendant les mois restants de l’année. La solution demeure la même au niveau national. Se tourner vers la France pour travailler là-bas pour les artistes et techniciens compétents, ou le chômage mortel à l’intérieur du pays où l’artiste ne s’active que lors des occasions nationales et religieuses, comme ce fut le cas cette année lors de la célébration du soixantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, ou pendant le mois de Ramadan du cycle de l’an.

L’absence de liberté oblige les créateurs de pièces de théâtre, qu’ils soient réalisateurs ou auteurs, à s’éloigner de tout ce qui rappelle l’Algérie en tant que société, culture et relations, afin d’assurer l’acceptation de la pièce lors du festival annuel.

Budget 2024 en Algérie, année d’élection où l’aubaine aux parasitaires.

Je ne vais pas entrer dans les aspects artistiques des pièces que j’ai vues cette semaine. Ma connaissance des techniques théâtrales en tant qu’art ne me le permet pas, bien que j’apprécie certains aspects tels que les décors, les costumes, et même la performance de certains acteurs dont je ne comprenais pas le discours, malgré leur expression en arabe, alors que je suis assis au premier rang.

Je vais me concentrer sur un point qui a attiré mon attention dans presque toutes les pièces, quel que soit leur sujet : s’éloigner des problèmes de l’Algérie et des Algériens, même par des allusions éloignées et mystérieuses, comme c’est souvent le cas dans certaines écoles de théâtre. Il est à noter que je ne suis pas un amateur de théâtre réaliste comme l’a vécu l’Algérie au début de l’indépendance, où le Théâtre National a produit des pièces réussies qui ont suscité l’admiration du public et ont remporté des prix nationaux et internationaux. Contrairement aux pièces de ce festival qui ont duré plus d’une heure. Elles sont principalement sous forme de dialogues mystérieux entre les acteurs, sans sujet clair pour la plupart. Des mots s’empilent, perdant leur signification, ne servant plus de moyen de communication entre les gens.

Une exigence commune au Hirak : un théâtre divertissant de la société.

J’ai essayé tout au long des jours du festival de discuter avec de nombreux acteurs pour trouver une explication à ce mystère qui a marqué les pièces, pour recevoir la certitude de l’extérieur de la salle du Théâtre National. Oui, c’est la liberté dont l’Algérien, en tant que citoyen et artiste, manque, le poussant à ce camouflage et à cette dissimulation qui le rapprochent de la phase qu’il a vécue pendant la période coloniale.

Durant cette période, l’artiste algérien ne pouvait se concentrer que sur les relations entre les hommes et les femmes et les aspects quotidiens simples, où la femme algérienne devait devenir un instrument de cri bruyant, pour une raison ou une autre, comme le concevaient les "sketchs" qui ont marqué le théâtre et la télévision à l’époque coloniale.

L’absence de liberté oblige les créateurs de pièces de théâtre, qu’ils soient réalisateurs ou auteurs, à s’éloigner de tout ce qui rappelle l’Algérie en tant que société, culture et relations, afin d’assurer l’acceptation de la pièce lors du festival annuel, financé par les fonds publics, et l’Algérie traverse une campagne présidentielle qui durera cette fois toute une année, également basée sur les fonds publics, contrairement à ce qui prévalait dans une autre époque politique - l’époque de Bouteflika, par exemple - où le candidat à la présidence essayait de se taire sur les élections jusqu’aux derniers mois, réprimandant formellement ceux qui préconisaient prématurément de parler d’elles !

Comme le faisait souvent Ahmed Ouyahia, contrairement à cette année où la situation est totalement différente, comme nous l’avons vu cette semaine à l’occasion du discours du président à la nation à travers les parlementaires - ce n’était pas un discours diffusé directement à la télévision comme on aurait pu s’y attendre - où l’un d’eux a insisté avec une spontanéité assurée à inviter le président à se présenter pour un second mandat, rapprochant la scène politique de l’image qui prévalait dans certains pays du Moyen-Orient…

Quand le théâtre en Algérie perd la narration pour la paix sociale

… En attendant les manifestations spontanées qui confirmeront aux sceptiques du président que lui et son entourage suivront ce scénario qui n’est pas étranger à la situation politique en Algérie, comme nous l’avons vu avec Bouteflika. Une situation politique qui confirme que le président de la République n’a pas d’autre choix que de demander un deuxième et un troisième mandat si possible, en raison de la situation de turbulence que le système politique vit toujours, de la manière dont le président accède à son poste et gère sa durée au pouvoir, dans un équilibre des pouvoirs entre le nerf civil et militaire composant la pyramide du pouvoir en Algérie, que nous pourrions retrouver à d’autres occasions au cours de cette année.

Les élections que vivra l’Algérie tout au long de l’année 2024. En plus des pièces de théâtre que j’ai réussi à voir au cours de cette dernière semaine de l’année 2023, j’ai dû assister à cette réunion de solidarité avec le peuple palestinien, dénonçant le génocide auquel sont confrontés les habitants de Gaza. J’ai été invité par Amnesty International, qui s’est contentée d’une petite réunion dans son siège à la capitale, après avoir été interdite de la salle qu’elle avait demandée pour accueillir cette réunion de solidarité avec le peuple palestinien. Pendant ce temps, des millions de personnes dans le monde manifestent leur solidarité avec ce peuple frère. En Algérie, les gens sont encore interdits d’exprimer leur solidarité en dehors des salles, comme cela prévaut dans la nouvelle Algérie.

Une Algérie nouvelle qui persiste à pourchasser sa jeunesse activiste pour les pousser à l’exil dans les pays occidentaux, comme cela s’est produit avec le jeune militant des droits de l’homme, Zaki Hanash, la dernière semaine de cette année, après avoir risqué de rester à Tunis pendant des mois après sa sortie d’Algérie, contraint par des harcèlements et une détention. Avant que le gouvernement canadien ne lui accorde le droit d’asile sur son sol. La situation de ce jeune militant est semblable à celle du Festival National du Théâtre et aux formes de solidarité avec le peuple palestinien, confirmant que l’Algérie traverse une crise de libertés effective. Malgré tout, bonne année à tous.

Nacer Djabi : Écrivain algérien, sociologue ayant plusieurs publications et professeur de la FAC centrale d’Alger en cette matière et chercheur au CREAD.

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Vous pouvez répondre, au court sondage, en langue arabe.-

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Voir en ligne : Algérie - théâtre

     

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