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Le langage des NTIC s’impose et induit une chance à tous les argots.

dimanche 17 mai 2009, par N.E. Tatem

Aux grandes Å“uvres humaines, révélées par les vestiges venant du plus lointain de la nuit des temps, on attribue que seuls les langages ont engendré leur création. Depuis moins d’un demi-siècle résonne, avec un ample foisonnement, le nouveau langage lié aux NTIC (Nouvelles Technologies de l’information et de la communication). Avec un atticisme qui semble versé au futur, tant ses intrusions adviennent avec la surprise de découvertes non encore diffusées. Il se déploie sans confins et arpente toutes les voix/es de la solennité où se rattrapent ceux qui ne veulent pas se laisser dépasser.

Par le passé, seuls les argots étaient indéchiffrables aux communs. Parce qu’ils naissent à la marge de la société, se développent selon les circonstances de besoins spécifiques et se créent par la volonté des communautés qui les utilisent. On a droit à l’argot des marins, celui des taulards, des brocanteurs... Et même au mixte qui s’approprie des termes bien éloquents d’autres langues. A entendre de nos jours un jeune vous dire : « J’ai été Zaéfe » en remplacement de : je me suis f ché, on détecte l’apport du parler maghrébin qui n’a rien à voir avec l’arabe académique. Par le passé il avait fourni des élocutions comme « kif-kif » (la même chose) ou « chouia » (un peu). Bien sûr l’oralité, pour ce cas, est maîtresse des influences.

Quant à la poétique vachement turgescente du rap, agrémentée de libres paroles et avide de langue verte, elle gagne de sa tolérance aux verbiages du petit peuple. Même avec le verbe marginal et les formulations nouvelles, une convaincante synchronisation de la musicalité de ses textes aux rythmes saccadés les enveloppent. Cette poésie engrange toutes paroles à la métaphore séditieuse et dérange l’establishment qui tenta, sous la double bannière de la morale et de la puissance publique, de la censurer avec l’espoir de l’interdire faute de pouvoir la mater. 237 députés ont signé, en 2005, une pétition afin de la mettre au pas, en vain même si l’initiative est sortie de l’hémicycle où siègent ces élus signataires. Si le contenu de ces chansons est d’une agressivité verbale avérée à l’égard des flics et même d’autres corps constitués, ils ont un style à défendre qui ne plaît globalement pas à tous. Et son langage n’est pas innocenté des attaques ennemies.

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Avec les résultats des joutes électorales 2007, une telle censure risque de revenir en force même si la vague bleue, allergique aux « Kaïras », a été légèrement atténuée. Dans le même registre, l’affaire du groupe « Kam’s » dont la mairie communiste de Bobigny et un centre culturel ont soutenu l’édition d’un l’album au point de l’offrir avec un agenda à 4 000 lycéens. Ce fait montre que les divergences d’interprétation de la liberté d’expression est bien plus compliquée que celle des significations des mots, surtout quand des appareils institutionnels divergent.

Le verlan, qui existait depuis déjà des décennies, ou bien plus d’un siècle sans qu’il ne soit détecté parce que reclus dans les bas-fonds souvent impénétrables, a connu une sensationnelle mutation passant pour l’idiome exclusif du banditisme au plus courant support des conversations de la jeunesse. Abondamment parlé chez les habitants des cités urbaines dites « difficiles » desquelles on ne peut soustraire aucun quartier de la généralisation de la difficulté « sociale » et d’une communication « sociétale » uniforme. Ce dialecte rebute son cloisonnement, s’avère prolixe et est plus amovible qu’on le croit. Avec ses règles aléatoires, il se galvaude avec une propension de première pratique langagière non conformiste de notre époque.

Plus récemment, un autre langage à la transcription fictive a chargé, toutes cornes dehors, avec l’individualisation du téléphone qui induisit son port dans la poche de l’usager. Le « texto » tirant un sens de la franchise et une déférence de la forme textuelle, passe pour le manuscrit spontané sans laisser indifférentes les réticences envers les altérations du français. Sa courte genèse s’est produite tel l’éclatement de l’atome, dit-on à l’origine de l’univers, pour se propager partout. Il fut, en peu de temps, enserré dans l’ensemble tribal dont aucun paramètre n’a cerné la communauté, avec exception d’une reconnaissance écourtée en pratique juvénile. Il a ébréché rapidement la quarantaine de dépréciation qui le prenait pour une éphémère tendance de sous-culture. L’aspect d’un SMS, imagé comme un éclair, s’impose d’une part plus adéquat à l’existence accélérée que nous vivons, et de l’autre, il lui est heureusement pardonné son style bourré de diminutifs, de contractions et de bribes. Ces derniers économisent l’espace, du nombre de lettres ou caractères, permis par l’appareil ou l’opérateur. A la barbe des rigoristes, respectueux et maladivement fanatiques des strictes règles grammaticales et d’orthographe de la langue, qui se sont offusqués préjugeant une atteinte à un dogme que même les académiciens n’ont pas ouvertement dénoncé, la naïveté du verbe a eu le dessus. La spontanéité s’est faite de la lésinerie sur la page qui se lit comme même, et devint vite un carcan banalement usité et continuellement défilant.

Les jargons corporatistes, de leur côté, établissent leur lexicologie conceptuelle spécifique, où chaque mot renferme un étalement de significations selon le mode, l’emplacement et le contexte où il est utilisé. Les érudits d’un domaine donné préfèrent, sans lourdeur ni gêne pourtant d’une manière récurrente, faire usage de la terminologie sélectionnée par leur profession. On vous dira et écrira par exemple « marketing produit... » Une vraie formule qui interpelle toutes les actions qui favorisent une commercialité : depuis la fabrication mettant au-devant les composantes, à la présentation en rapport avec la forme et l’emballage, à la vente déterminant les circuits de distribution jusqu’à l’opération de publicité qui cible les acheteurs potentiels.

Dans beaucoup d’activités (architecture, tourisme, médecine etc.) les analogies et les idées surviennent du terme revenant d’une panoplie dûment connue. Ou pris des retentissements d’autres langues à dessein de donner une dimension originelle au propos, depuis le créateur qui l’a lancé. Pour expliquer judicieusement le sujet d’une partie de discussion ou d’un texte, on n’hésite pas à métamorphoser tous les mots, à en tirer des adverbes possibles et de générer des élocutions solidement construites à dessein de bien imaginer un sens. "Manager" est synonyme de diriger, comme verbe. Comme nom il remplace aussi à la fois directeur et directrice dans beaucoup d’activités, pour signifier gestionnaire. De nos jours, les élèves des différents paliers du système scolaire utilisent couramment, avec le sarcasme de leur milieu, « Dirlo » pour désigner le responsable d’établissement.

Le fait accompli du langage des NTIC : le forcing d’un charabia percutant

Un petit rap fan de l’argot... En plus c’est une belle chanson...

Depuis moins d’un demi-siècle résonne, avec un ample foisonnement, le nouveau langage lié aux NTIC (Nouvelles technologies de l’information et de la communication). Avec atticisme qui semble versé au futur, tant ses intrusions adviennent avec la surprise de découvertes non encore diffusées. Il se déploie sans confins et arpente toutes les voix/es de la solennité où se rattrapent ceux qui ne veulent pas se laisser dépasser. Les spécialistes happent, les premiers, de l’innovation des termes qui laissent perplexes plus d’un disciple et praticien. Ils saisissent d’instinct ce qu’ils devinent d’abord, puis s’imprègnent rapidement du rationnel que leurs rencontres leur ont apporté.

Comme un casse-tête kaléidoscopique, fait d’anglicismes imposés et de chinoiseries compliquées, le vocabulaire lié à l’informatique explose. Il ne cesse de drainer une multitude de termes où la communication exponentielle et habitant une technologie jongle avec toutes données. A l’échange s’additionne la formidable "Toile", gourmande de promptitude, accélérant surtout les processus de circulation de l’information, les rendant artifices mais favorisant grandement des vertus pluridisciplinaires. Gare aux diplômés et autres parés de savoir, qui exercent dans des métiers de pointe, s’ils ne maîtrisent pas les loquacités de leur outil de travail. Il « l’ordi. » est incollable en vitesse de traitement des énoncés, données et problèmes qui lui sont soumis. Alors prendre le temps et méditer, c’est perdre de la vitesse...

De quoi tourmenter le monde francophile sommé d’employer la terminologie des NTIC, comme une réelle contrainte imparable que la langue de Shakespeare semble, n’étant pourtant certainement pas la seule, prescrire. Tout le monde craignait l’avènement d’un monde de la communication unifié (avec le satellite, le téléphone, le portable et Internet) qui aurait pour langue dominante l’anglais. -1-

Les glossaires des traductions en français, accolés aux systèmes d’exploitation et les logiciels de traitement de texte surtout, restent approximatifs en matière de conformité rajoutant des ambiguïtés même aux plus érudits qui assimilent bien les affinités des mots. Rien n’arrête la révolution véhiculée par l’outil informatique enclenchée depuis les années 1980, avec exigence désormais pour toutes les sociétés de s’adapter, par l’ajout de mots à leurs langues donc aussi et surtout aux dicos, de la profusion effrénée de vocables nouveaux qui définissent une action ou un organe d’un procédé ou même un objet parmi un matériel opérationnel.

Le français, aux aptitudes poétiques pour certains linguistes ou de négociations pour d’autres ou bien une marque de l’art culinaire, ne se perd pas dans des dédales obscurs, il en absorbe l’essentiel. A l’instar des autres langues, il s’approprie sa part du flux langagier, scindé au Web pour l’amplitude, qui ne semble jamais tarir. Du fait de la transcription en lettres latines, la prédisposition du français à gagner de nouvelles expressions est assez importante des maniements des NTIC dès leur existence par les francophones. Le mot courriel est passé de la francophonie canadienne sans remous, il a été adopté même s’il ne fait pas encore une totale unanimité.

Le raffinement et l’agilité font bon ménage dans les transferts de concepts entre cultures du globe, et pas seulement au niveau des NTIC. Où il suffit d’équipement pour que la faculté obligeante d’uniformiser l’usage des termes dans les domaines où s’appliquent ces NTIC, afin rende accessibles les discernements sous leurs différentes variantes. Cette nouvelle forme de partage de l’information favorise le langage commun -2-.

Sigles, initiales et compositions assujettissent les langues de la Terre à la bifurcation vers une spécificité comblée d’universalité. Les archaïques qui n’ont pas encore pris le départ à l’heure du passage d’une communication sans confins qu’ils considéraient accessoire, ils ont aujourd’hui pour leur compte ne pouvant contourner le plus que nécessaire. La splendeur des rhétoriques soumises aux règles strictes de la langue académique n’a plus de pouvoir et d’emprise sur les remises à niveau de tous les langages. L’arroseur arrosé, ils prodiguent peu, mais encaissent avec forcing une substance langagière imparable et assez rugissante. Elle traduit l’acceptation de tous les baragouins activés par les cercles qui ne les manient souvent à bon escient que pour insulter des corps constitués.

Aux grandes œuvres humaines, révélées par les vestiges venant du plus lointain de la nuit des temps, on attribue que seuls les langages ont engendré leur création. Sans la parole avec une teneur intelligible, aucun ouvrage aussi compliqué ou modeste soit-il ne pouvait être conçu. Comme on soupçonne certains animaux capables de communication qui, à ce jour et de toutes les espèces y compris les plus doués comme les singes et les dauphins, elle reste indéchiffrable par l’homme. Mais c’est l’écriture, le propre du savoir de ce dernier, qui a tranché entre les espèces.

- 1- In « La Révolte du pronetariat » - ouvrage en numérique - de Joël de Rosnay avec la collaboration de Carlo Revelli, librairie arthème Fayard, 2006. Page 197.

- 2- Idem. page 127.

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