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Démission collective des chefs militaires quand la justice et certains médias sont noyautés par les islamistes.
dimanche 31 juillet 2011, par
Il était déjà difficile de croire qu’un Etat résolument laïc admette qu’un parti religieux le dirige. Du fait que la croyance qu’une sécularisation irréversible a eu le temps de s’ancrer dans la société, en consolidant l’esprit de liberté de croyance, et au sein des institutions qui supervisent les rapports entre les composantes humaines. La Turquie voit déboucher, désormais son expérience de faire cohabiter deux projets fondamentalement antagoniques, sur un mur qu’il faut franchir ou démolir.
Plus de 40 militaires de hauts rangs, soit des généraux, soit un dixième du commandement supérieur de l’armée, et quelques 250 militaires de différents grades, sont accusés de complot contre le gouvernement du Premier ministre Tayyip Erdogan. L’avancée des islamistes du parti APK pour le contrôle de l’armée s’est faite avec une main basse faite sur l’institution d’abord sur la justice. Elle passe depuis quelque mois à l’escalade, avec un projet de nouvelle constitution qui risque de dénaturer complètement l’héritage moderniste de Mustafa Kemal Atatürk. Et les militaires qui ont, depuis des décennies, joué le rôle de gardiens de ce projet de société sont sur la défensive.
Une crise couvait depuis l’arrivée des islamistes au pouvoir. Elle arrive au point de non-retour avec la démission du Chef d’état-major général Kosaner Isik, qui l’a déposé, vendredi 29 juillet, avec les principaux commandants de l’armée de terre, de la marine et armée de l’air. Ce nouvel fait, du départ des généraux a provoqué des remous dans l’armée. Comme il a été grandement ressenti dans les bourses mondiales.
<img359|left> ISIK KOSANER - Le chef d’état-major démissionnaire.
Dans un message d’adieu à « frères d’armes », Kosaner a ouvertement dit qu’il était impossible de continuer son travail. Puisqu’il ne pouvait pas protéger les droits de ses hommes détenus, en conséquence de ce qu’il a ouvertement désigné un processus vicié de l’appareil judiciaire. Insistant : « Il est impossible d’accepter leur détention comme étant en ligne avec les principes du droit universel, la justice et des valeurs morales. »
La Turquie est depuis déjà bien plus de 3 décennies parmi les 20 premières économiques du monde, d’où les regards intéressés qui lui sont réservés dans le monde. Il se révèle, de cette démission une nouvelle opportunité, pour Erdogan, d’étendre son autorité sur les forces armées qui constituent la deuxième plus grande force de l’OTAN, avec le nombre d’hommes. Les généraux de la Turquie ont organisé trois coups d’Etat depuis 1960 et ont pris le pouvoir, mais l’armée a ouvert la voie à la démocratie assurant des élections et l’alternance.
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Les relations entre les militaires résolument laïcs et le Parti du développement (AKP) dirigé par Erdogan, organisation plus considérée à tendance conservatrice, ont été depuis le début sans confiance. La victoire, de ces islamistes modérés, et leur prise du pouvoir en 2002, a suscité une méfiance du fait des racines et des discours islamistes de l’APK.
Ce dernier et son dirigeant ont minimisé l’importance de ces démissions. Qui pourtant sèment des questions et des peurs auprès de la population non-musulmane, des démocrates et des laïcs de la population. Les opinions sont polarisées et partagées, quant à l’avenir de la démocratie et du pays, entre les partisans du gouvernement et leurs opposants politiques, dont ceux soutiennent les militaires.
L’armée turque a diabolisée les islamistes depuis l’arrivée au pouvoir de l’APK. Les islamistes et nombreux, mais pas tous notamment les intellectuels, démocrates ont créé l’impression que les forces armées turques étaient une organisation criminelle. Avec la complicité de médias biaisés qui encourageaient, toutes sortes d’histoires fausses et des allégations, semblables à celles que l’on entend quotidiennement et d’une manière interminable sur l’armée algérienne. L’armée turque a été accusée d’avoir créé des sites Internet contre le gouvernement.
Erdogan, Gül et les autres fondateurs de l’AKP, étaient membres d’un parti islamiste que l’armée a chassé du pouvoir il ya 14 ans. Erdogan lui-même a été emprisonné pendant quatre mois en 1999 pour incitation à la "haine religieuse et raciale." Mais en tant que Premier ministre, M. Erdogan n’a pas lésiné de montrer sa domination de l’armée, à travers une série de réformes visant à faire progresser les chances de la Turquie de rejoindre l’Union européenne. Mais sur ce plan, son gouvernement patauge.
L’avenir immédiat de la Turquie est passé sous silence. Le plus lointain destin risque d’être l’effondrement de l’économie, même si dans les prochaines années un essor peut-être comptabilisé. Mais les libertés en p tiront avec d’autres équilibres sociaux, une question de temps.
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